Avec le recul, c'est drôle à lire

**Fifibrindacier** Mar 7 Oct - 15:04

Extrait de la Libre. http://www.lalibre.be/index.php?view=article&art_id=449452

Au Grand-Duché du Luxembourg, l'économie repose sur la place financière. D'où des enjeux multiples.
à luxembourg
Le Luxembourg n'avait pas le choix : il lui fallait participer au sauvetage de Fortis et de Dexia. Et pour autant que ce soit possible, il avait encore moins le choix que les autres pays. Ces deux institutions sont de véritables piliers de la place financière luxembourgeoise et on peut espérer - mais espérer seulement, tant l'irrationalité l'emporte maintenant dans les marchés - que les choses vont se stabiliser." Tel est le discours que nous ont en substance tenu hier, au Luxembourg, tant des politiciens - ministres compris - que banquiers, chefs d'entreprise et syndicats.

Si, plus encore que d'autres pays, le Grand-Duché n'avait pas le choix et retient son souffle, c'est parce qu'il présente une double particularité qui, dans des périodes de crise comme celle-ci, est un double défaut. D'abord, l'économie nationale repose sur le secteur financier, à concurrence de 60 pc des recettes. Une place spécialisée, qui plus est, dans la gestion de fortunes et les fonds d'investissement. Ensuite, à part la Banque et Caisse d'Epargne de l'Etat (BCCE, l'équivalent de feue notre CGER), et la Raiffeisenkas (issue du système des coopératives), toutes les banques sont étrangères et les décisions se prennent dans les maisons mères. C'est dire que l'Etat luxembourgeois n'a ni marge de manœuvre ni réel pouvoir de décision. Autrement dit, l'apport de fonds de l'Etat luxembourgeois dans le sauvetage de Fortis et Dexia n'a été possible que du fait de l'ancrage très fort de ces deux banques dans le pays. Pour les autres, plus rien ne devrait être possible.

Si l'effet boule de neige continue à frapper les banques, les recettes de l'Etat seront très durement touchées. Mais aussi l'emploi. Depuis plusieurs semaines, d'ailleurs, des rumeurs répétées - et parfois à bonnes sources - font état de futurs licenciements, entre autres chez Dexia. Et sur ce point, la Belgique sera fortement touchée. Car outre les quelque seize mille résidents belges au Luxembourg, l'écrasante majorité des plus de trente-deux mille travailleurs frontaliers belges sont employés par la place financière tout en vivant dans le sud de la province du Luxembourg, dont l'économie florissante n'est due qu'à l'"effet Grand-Duché". Si un frontalier perd son emploi, il émarge au chômage dans son pays d'origine...

L'opinion se montre aussi inquiète quant à ses économies. "Surtout pour les fonds de pension", nous confiait hier un directeur d'une très importante entreprise. "Les questions fusent pour savoir via quel assureur sont gérés les fonds de pension et dans quels fonds d'investissement ils ont mis l'argent. Chez nous, c'est à un point tel que nous avons fait une page spéciale - sans cesse actualisée - sur notre Intranet". Reste que "La Libre" a pu savoir, à excellentes sources, que nombre de clients de Fortis et Dexia ont retiré leurs avoirs pour les déposer (surtout) à la BCEE.

Alors que le Premier ministre, Jean-Claude Juncker, tout en restant très discret, tient un discours sévère - il a comparé la crise actuelle à celle qui a frappé la sidérurgie au début des années 80 -, le ministre du Trésor et du Budget, Luc Frieden, se montre plus rassurant. Hier, lors d'une conférence de presse, il a expliqué que les 2,5 milliards d'euros et les 376 millions injectés respectivement dans Fortis et Dexia avaient pour but de sauver l'emploi (les deux banques pèsent 7 000 emplois au Grand-Duché) et de rendre la confiance aux résidents, nombreux à y avoir leurs comptes. Il a également indiqué - ce qui en a surpris plus d'un - que ce geste "restaurera la confiance des investisseurs dans la place".

Luc Frieden a enfin indiqué "ne pas avoir connaissance d'autres risques de défaillance de banques similaires à Dexia et Fortis", tandis que les injections de fonds porteront la dette publique de 7 à 10 pc du PIB.